samedi, janvier 13, 2007

Isaac


Les doigts à quelques centimètres du verre. Une pose lascive. Et ses yeux qui clignent de fatigue. Je m'approcherais bien d'elle, je passerais bien ma main sur son visage mais il y a cet air boudeur qui laisse réellement présager du pire. Elle a porté le verre à ses lèvres et j'essaie d'imaginer ce qu'elle ressent au fur et à mesure que le liquide lui brûle l'oesophage et fait circuler son sang plus vite.
Ca arrache, dit-elle et c'est vrai qu'elle n'aurait pas pu mieux dire que ça. Ca t'arrache et ça te projette dans un monde que tu connais mal ou pas. C'est selon. Les pistes ont tendance à se brouiller surtout quand tu finis par remarquer qu'une énième bouteille est vide. Ca fait un peu cogner la tête et ça cogne à la porte aussi. Elle se lève un peu péniblement, avec une sorte de grâce au ralenti, on dirait un pantin désarticulé. Mouvements à la fois fluides et imprécis. Vous pourriez baisser la musique s'il-vous-plaît. Bien sûr, bien sûr. Désolée et bonne nuit. Elle referme la porte, revient dans la pièce, baisse le son de quelques crans. La trompette de Miles Davis n'est plus qu'un vague chuintement, on entend à nouveau les bruits des voitures par la fenêtre. Tu n'as pas froid. Et elle ferme aussitôt la fenêtre.
Si seulement je trouvais quelque chose à dire... Mais, je suis comme paralysé par le désir que j'aie d'elle. Elle s'est rassise et s'est mise à me fixer intensément. J'ai l'impression qu'elle peut voir à l'oeil nu les courbes que forment, parfois conjointement, ma frustration et mes hésitations. La pluie commence à battre le pavé. Une pensée sauvage me pousse à me lever, m'approcher de la fenêtre, je tends la main et lève les yeux vers le ciel opaque. Les goûtes s'écrasent les unes après les autres et je ferme les yeux pour mieux goûter cette sensation. C'est peut-être aussi simple que cela, laisser ruisseler l'eau à travers ma chair, laisser s'écouler les émotions contradictoires qui me secouent. Je tourne la tête et au sourire qui est scotché à ses lèvres, je comprends qu'elle a pris ça pour un acte excentrique.
Comme s'il était absurde. Comme s'il ne se passait rien et que mon attitude n'était qu'un néant en réponse à un autre néant.
Et c'est en moi que se creuse le vide.
Et c'est entre nous que je m'écartèle un peu plus.

To be continued?




7 commentaires:

Anonyme a dit…

Désolé, j'a pas le temps de lire ton post mais si tu lis le dernier mien en date, j'ai oublié le lien donc ça aide à comprendre...
J'me dis que tu dois encore être connecté.
C con un blogger quand meme!
http://cerealeskiller.hautetfort.com/archive/2007/01/14/qui-va-piano-va-sano.html

Anonyme a dit…

j'ai vu que tu avais mis Roads de portishead ds la playlist et je me suis demandé : quelle est la lmite de stockage de Blogger?
j'ai pas réussi à trouver...

Anonyme a dit…

Ce texte beaucoup j'aime.

Anonyme a dit…

Waouh! (admiration)

mlys a dit…

Ton texte est vraiment magnifique ...Que de dire plus ? Tu as toute mon admiration. Tu as une écriture tellement belle qui me renvoie toutes les émotions en pleine face. J'attends avec impatience une éventuelle suite à ce début prometteur...Car il y a forcément une suite, n'est-ce pas ? Tu ne peux pas t'arrêter là.
Bon courage pour l'écriture.

Affectueusement.

FlowerByKenzo

Anonyme a dit…

Chsais les autres, mais moi je me crève les yeux sur tes post-it. Tu peux pas agrandir la police?

Anonyme a dit…

Soufflée : je suis proprement incapable de me lancer dans de telles descriptions. Ton texte est magnifique. il faut vraiment être torchée pour baisser le volume de Miles...;-)

Encore une fois, en plus de l'écriture, je suis fan de la mise en page de ton blog.
So long...