samedi, juin 24, 2006

Nuits Grises - Part One

Et si j'ai une inspiration fulgurante là et que je me lève, ça te dérange? Voilà ce que je lui ai dit, il faisait une nuit bien noire ce soir-là... Il n'avait pas dit grand chose : juste, non, vas-y... Alors, je me suis levée, j'ai allumé l'ordinateur et je me suis mis à écrire, j'étais comme folle, possédée par ma plume (bien que cette expression ne reste à cause de la nouvelle technologie que, hum, métaphorique.) Une histoire est née, mais quelle histoire? On me dit souvent que je devrais écrire sur ma vie, parce que j'ai de l'humour et qu'il m'arrive aussi toujours tout un tas de trucs extraordinaires... Le problème, c'est qu'une fois raconté oralement, les souvenirs se dépèchent de quitter ma mémoire. Ils m'ont illuminée un instant, ont ébloui ces autres qui daignent m'écouter et me quittent ensuite. Comme s'ils avaient accompli leur devoir et que maintenant, ils ne devaient plus exister. Avoir une mémoire de la sorte, une mémoire qui fait que quoiqu'il arrive, je ne vis qu'au jour le jour, ça a ses avantages. Ca laisse beaucoup de portes ouvertes à l'imprévu, à l'imprévisible... Pourtant, l'inconvénient, c'est qu'on devient vite en attente, presque accro à ces instants de "magie". Je suis souvent à les guetter, à les espèrer. Non pas parce que je déprime, mais parce que cela m'ouvre incroyablement la tête, c'est comme une bouffée d'oxygène... C'est comme ce soir là où je laissais couler les mots sans discontinuer, où tout était fluide et sans efforts... C'est rare... Alors que souvent dans l'écriture, on se retrouve coincé. Regardez comme je suis attablée au comptoir de ce bar, je veux boire quelque chose mais que prendre? Il y a tant d'alcools différents, de tous les goûts et de toutes les couleurs... Alors, de quoi j'ai envie à ce moment précis, en cet instant t du temps, que me faut-il? Qu'est ce qui convient à mon humeur? Et puis, là, je jette un coup d'oeil angoissé à mon sac. Est-ce que j'ai assez? Oui, d'accord, le problème du financement est essentiel mais tout dépend aussi ce que je décide de consommer... Alors, de quoi j'ai envie?
On attend et on remet à plus tard? J'ai trop bu hier peut-être? Ou alors je crame trop ma vie par les deux bouts en ce moment, et si je m'allumais plutôt une clope? Tout ce questionnement, en vérité, ça ne me tient pas éveillée tant que ça, on s'imagine souvent les écrivains penchés sur leurs cahiers la nuit, le teint livide, un peu de salive au coin de la bouche, éructant de fièvre, de ferveur... Ca, c'est pour la version maudite et bohème, il y a aussi celle de l'Ermite, un gars sain (il est quand même un peu marié et un peu père), qui fait son boulot avec des horaires de fonctionnaire... Et puis, y'a ceux qui savent pas encore comment ils sont censés s'y prendre et je crois bien que j'en fais partie... Pas seulement vis à vis de l'écriture mais peut-être tout simplement de la vie. Je cherche toujours les complications. Les complications parce que comme ça, je ne peux que m'attarder sur des détails, les vices de forme, ces petits vices de procédure qui rendent une situation parfaite totalement ratée, ou inversement qui donnent du charme à quelque chose de complètement cataclysmique. Je ne prends toujours la vie que comme elle est : on apprécie donc ma sagesse, mon détachement... Ceux qui me connaissent savent bien la vérité, eux. Et heureusement... Mais, je suis cette personne-là, prête à tout accepter, parce qu'à regarder ce qu'il se passe autour de moi, l'incohérence est reine alors il s'agit bien de lui trouver au final une certaine logique interne. Je me souviens que cette nuit-là, je l'ai regardé dormir pendant longtemps, ça ne m'a pas apportée de réponses, mais ça m'a apaisée. A bien y regarder, nous sommes absurdes, nous sommes terriblement vains. Puis, j'ai attendu pendant longtemps, très longtemps, j'ai regardé le jour se lever sur mon balcon. Assise, droite sur ma chaise en bois. C'était terriblement inconfortable mais cela me tenait éveillée. J'ai regardé le soleil monter peu à peu, prendre ses droits sur la nuit. J'ai regardé la clarté devenir puis être. Ca ne m'a pas transformée de l'intérieur, ça n'a pas chassé mes démons, je n'ai pas été en adéquation avec ce qui s'opérait sous mes yeux. J'ai réalisé que quoiqu'il arrive, j'étais heureuse, que la lumière me piquait les yeux mais qu'elle réchauffait ma tête, que ma nuit blanche me laissait pantelante de fatigue mais qu'elle m'offrait la perspective de percevoir la vie avec cet espèce de voile brumeux parfois bien plus lucide que n'importe quelle visée objective, que si je ne savais pas quoi faire de moi-même, au moins, je savais bien qu'il fallait que je trouve.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

La pendule,sonnant minuit,
Ironiquement nous engage
A nous rappeler qu elle usage
Nous fîmes du jour qui s enfuit.

Pourqoi je te cite baudelaire apres avoir lu ce texte? Parceque tu te poses de si belle questions... Et j aime ça. Kadija.